Janice Bailey

Directrice scientifique, Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies

« Encore aujourd’hui, les femmes sont d’abord jugées par leur apparence. Je serai très exposée. J’aurai assurément des moments d’inconfort. So what ? »

Scientifique accomplie et modèle de leadership féminin, Janice Bailey est directrice scientifique du Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies (FRQNT). Titulaire d’un doctorat en reproduction animale de l’Université de Guelph et d’un post-doctorat de la Faculté de médecine de l’Université de Pennsylvanie, elle a été professeure en sciences animales à l’Université Laval et doyenne associée responsable de la recherche à la Faculté des sciences de l‘agriculture et de l’alimentation de l’Université Laval. Elle a à cœur l’excellence en recherche scientifique et insiste sur l’importance d’une parité des sexes à la tête de réseaux stratégiques en recherche.

Dans le quotidien de Janice Bailey, chaque minute est comptée. Congrès, lancements, événements, conférences : elle est partout là où elle peut partager sa vision de l’excellence en recherche, développer des collaborations, favoriser la diversité des parcours en recherche et répondre aux préoccupations de la population.

Les sciences n’ont jamais été aussi importantes dans notre société, a-t-on pu constater avec la pandémie. « Je le crois aussi. Les sciences jouent un rôle majeur face aux crises environnementales, climatiques, de la biodiversité et de santé comme la COVID-19. »

Malgré son emploi du temps chargé, elle a généreusement accepté de faire partie du projet les Audacieuses et d’inscrire à son calendrier la date du rasage collectif. « Je n’aime pas particulièrement être le centre d’attention, mais je comprends que j’ai un privilège et que je suis un modèle féminin en sciences. If you can see it, you can be it. Je suis honorée d’être une Audacieuse parmi ces femmes inspirantes de divers milieux. »

Quand on a précisé à la scientifique que sa participation venait avec le rasage de ses cheveux, elle n’a pas bronché. « Je venais d’accepter cette invitation inattendue. C’était pour moi une occasion de promouvoir la place des femmes en sciences. Quand on m’a dit que je devais en plus raser mes cheveux, j’ai sursauté. Mais j’ai seulement répondu: ah, ok. Comment pouvais-je accepter d’être un modèle et ensuite reculer parce que je dois raser ma tête ? C’est superficiel, les cheveux. Recueillir de l’argent me stresse beaucoup plus. »

Le cancer dans sa vie

Janice Bailey saute dans l’aventure parce qu’elle est consciente de l’importance de soutenir la recherche en cancer pédiatrique. « C’est très important de financer la recherche en général et c’est dommage qu’on doive faire des efforts comme ça pour y arriver. C’est un combat au quotidien. »

De façon plus personnelle, elle a elle-même reçu un diagnostic de cancer du sein au printemps 2020, au tout début de la pandémie. « J’ai dû composer avec l’inconnu et l’annulation et le report de rendez-vous. Mais j’ai été privilégiée, parce que je m’en suis sortie avec deux chirurgies et une série de radiation. »

Elle imagine le désarroi que peuvent vivre les familles de Leucan. « Je pense aux parents qui habitent loin des grands centres, qui vivent le stress d’avoir un enfant malade, qui doivent jongler avec les obligations familiales, le travail, le voyagement, les incertitudes. Si mon petit geste peut aider à offrir le meilleur aux enfants et à leur famille… »

Contre tous les diktats

Dans le milieu des sciences, l’apparence des femmes est perçue de façon singulière, souligne Janice Bailey. Dans un laboratoire, une tête chauve est probablement mieux perçue qu’une manucure éclatante, de gros bijoux ou des talons hauts, avance-t-elle. « Malheureusement, si une femme est belle et fière, elle perd de la crédibilité et n’est pas considérée comme une scientifique sérieuse. Si une femme aime se maquiller, pourquoi pas ? Ces gestes de beauté sont souvent pour nous donner une petite dose de confiance. On doit respecter la façon d’être de chacune. » Elle s’inscrit contre les diktats. Cheveux ou pas.

Comme elle a un rôle public, elle sait qu’elle devra composer avec le regard qu’on posera sur elle. « Encore aujourd’hui, les femmes sont d’abord jugées par leur apparence. Je serai très exposée. J’aurai assurément des moments d’inconfort. So what ? » Elle se présentera sans artifices. Sa mère lui a offert un chapeau qu’elle portera seulement si elle a froid. « Je porterai peut-être des boucles d’oreille. Mais je me suis procuré une crème pour le cou. J’ai quand même 57 ans ! », admet-elle en riant.

Elle s’enthousiasme devant cette solidarité féminine qui se dessine parmi les Audacieuses. « J’aime beaucoup faire partie d’une équipe, et pour moi, cette notion de solidarité est ce qui m’anime le plus dans ce projet. J’aime voir toutes ces petites faces réunies sur mon ordinateur, faire partie de cette belle gang ! » Elle a très hâte de rencontrer ses consœurs (en présentiel!) et prévoit que leur relation sera marquante.